Plusieurs produits de base sont difficiles d’accès, et d’autres vont le devenir. Myriam Qadi, chargée de recherche chez NielsenIQ, explique.
Myriam Qadi, chargée de recherche à l’Institut NielsenIQ, a répondu aux questions de CMQLF sur les pénuries de produits à venir.
Vous êtes l’un des auteurs d’une étude sur la disponibilité des produits dans les supermarchés. Quand les tensions sont-elles apparues ?
Myriam Qadi : Dès le week-end suivant l’invasion de l’Ukraine, nous avons constaté une ruée dans les magasins. Début mars, on a assisté à un phénomène de soldes anormaux, avec un taux de disponibilité qui a commencé à diminuer pour les huiles, les graisses, les pâtes et la farine.
Avec la hausse des prix et l’issue incertaine de la guerre, de nombreux ménages ont acheté des produits de première nécessité. Le taux de disponibilité habituel des huiles, comme de la plupart des produits alimentaires de base, est d’environ 97 %. En mai, nous sommes tombés à 74%, ce qui signifie que les huiles étaient disponibles dans trois quarts des magasins. Début juillet, ce taux est remonté à 89%.
Y aura-t-il une pénurie de ces produits ?
M. Q. : Pas pour l’instant. Même si les achats de précaution persistent, les stocks dans les hypermarchés sont toujours là. Les rayons sont réapprovisionnés le lundi et le mardi. Mais les jeudis, vendredis et samedis, il y a une rupture totale de stock dans le magasin. Le niveau des ventes de ces familles de produits reste très élevé, +30 à +50% sur les huiles chaque semaine par rapport à l’habitude. Pour la moutarde, l’indisponibilité n’est pas seulement due à des achats de précaution, car les ventes diminuent. Le produit se raréfie. En juillet, près de 30% des magasins étaient sans moutarde.
Quels autres produits sont sous pression ?
M. Q. : Les féculents, la semoule, les pâtes, la farine et le riz continuent de baisser en termes de disponibilité, sans être à un niveau critique en termes de stock. En plus des difficultés liées à la guerre, les matières premières utilisées pour le conditionnement ont un impact sur la disponibilité de certaines références. Par exemple, les concentrés d’agrumes ou les boissons réfrigérées sont affectés par des problèmes de carton d’emballage et d’aluminium.
Des emballages plus chers et moins disponibles
Les produits alimentaires ne sont pas les seuls à pouvoir être affectés. Certains contenants posent également problème.
Les bouteilles en verre
La guerre a provoqué l’arrêt de la production de sept usines ukrainiennes, filiales des deux géants du verre Owens-Illinois et Verallia, ce qui a immédiatement mis le marché sous pression. L’augmentation du gaz, utilisé massivement dans les fours, a été répercutée sur le prix d’achat des bouteilles vides. Celui-ci pourrait augmenter de 30% au total d’ici l’été.
Mais c’est surtout la disponibilité du verre blanc qui pose problème. Les producteurs de vin et de jus de fruits doivent attendre plusieurs mois une livraison pas toujours complète. Pour ajouter à leurs difficultés, les capsules en aluminium sont également difficiles à obtenir. Selon certains producteurs, cela peut prendre jusqu’à six mois.
Les boîtes en aluminium
L’aluminium entre dans la composition des canettes et des boîtes de conserve, un marché qui a connu une hausse cette année. La tonne d’aluminium est passée de 2 500 dollars début 2022 à 4 000 dollars en avril, avant de retomber aux alentours de 2 700 dollars en mai. Là encore, la flambée des coûts énergétiques a contraint certains fabricants à réduire leur production.
Cartons d’emballage
En 2021, les prix du papier et du carton ont fortement augmenté : + 160 % pour le carton ondulé de récupération, a annoncé par exemple l’Union française des industries du carton, du papier et de la cellulose. Ainsi, les prix se sont envolés de 30 à 40 % depuis janvier 2022. A cela s’ajoute une augmentation des délais de livraison pour les papiers graphiques, les cartons plats et les emballages souples.